Compte rendu
Après un bref historique sur les prisons, les observations remettent en cause la politique répressive centrée sur l’incarcération.
Chapitre I – UNE RÉALITÉ CARCÉRALE MÉCONNUE
Les causes sont l’accroissement de la durée de détention (alourdissement des peine, diminution des réductions de peine ou les mesures de libération conditionnelle) et le respect scrupuleux de l’encellulement individuel dans les établissements pour peine).
Les conséquences : des règles du code de procédure pénale ne peuvent pas être appliquées et les conditions de vie en détention sont difficiles pour les détenu(e)s et les surveillants.
Les établissements sont majoritairement vétustes. Les locaux sont très dégradés en raison du manque d’entretien (faible montant des crédits d’entretien). Il existe des problèmes de conception dans des établissements récents.
Importance de la dimension humaine des établissements (la construction de grandes prisons est discutable), et de l’association des personnels à la conception.
Conditions de détention inégalitaires selon la taille, et l’implantation géographique. Règles de vie disparates. Forte distorsion entre la situation des condamnés et celle des prévenus en termes de conditions matérielles et de règles applicables. Cas des condamnés qui exécutent leur peine en maison d’arrêt.
Le viol et les agressions sexuelles sont la première cause d’incarcération (22,5% en 2000) ; 32 % consomment de la drogue (40% en Nord-Pas-de-Calais) ; 10% présentent des troubles psychiatriques ; le nombre de mineurs s’accroit.
Fréquence plus grande des agressions dues à des problèmes psychologiques ou comportementaux et une nette sur-représentation des condamnés parmi les agresseurs, notamment les condamnés à des peines de 10 ans et plus.
Problème de l’isolement prolongé (certains détenus peuvent rester plusieurs mois voire plusieurs années en isolement) : “les conséquences du placement à l’isolement sont lourdes en termes d’accès aux équipements et aux activités et la solitude prolongée a des effets psychologiques importants”.
Chapitre II – AFFIRMER L’IDENTITÉ DE L’ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE
Pénurie de surveillants, personnels techniques et administratifs, pourtant l’augmentation des emplois est continue (organigrammes obsolètes).
Rythmes de travail, en termes de charges journalières, de permanences de nuit ou de congés sont difficiles à assumer : conséquences graves pour la sécurité ; capacité d’écoute rendue difficile ; actions de formation difficile.
Malaise vis-à-vis des campagnes de presse sur les prisons et du livre de Véronique Vasseur (les surveillants dénoncent les dysfonctionnements depuis longtemps sans avoir l’impression d’avoir été écoutés) / Sentiment de solitude (en détention, vis-à-vis du ministre, de la hiérarchie) et pas ou peu de lieux d’écoute (notamment après un drame)
La modification de la population pénale à nécessité de l’adaptation des anciens surveillants. Tandis que la nouvelle génération (plus diplômés) semble plus sensibilisés à la mission d’insertion. Toutefois une certaine ambiguïté demeure : jugement encore négatif des surveillants “proches” des détenus.
A ce titre le rapport recommande une perméabilité entre les fonctions, notamment entre milieu ouvert et milieu fermé. “Il est important de réfléchir à la mise en place de passerelles entre l’administration pénitentiaire et les autres administrations : l’expérience professionnelle qui caractérise les surveillants, avec la connaissance qu’ils ont de la délinquance, de la pratique et de la gestion de la détention, devrait être valorisée et mieux utilisée.”
La personnalité de chaque chef d’établissement et le turn-over engendre une diversité des modes de gestion. Nécessité d’évaluations poussées et régulières.
Incapacité à communiquer avec l’extérieur (pas de personne dédier à la communication, notamment avec les familles) ; Faible concertation ; Pas de réel projet d’établissement (lettre de mission essentiellement tournée vers les impératifs de sécurité et non par rapport à des objectifs d’insertion) ; Mouvement de déconcentration : ” La question de la poursuite de la déconcentration, au regard des moyens humains, est clairement posée. La gestion de la région pénitentiaire de Lille qui recouvre deux régions administratives, quatre cours d’appel, quatorze départements et compte 6 200 fonctionnaires et 11 000 détenus, repose sur une dizaine de personnels de catégorie A. Le même problème se pose pour la déconcentration au niveau des établissements.”
Chapitre III – REPENSER LA PLACE ET LA MISSION DE LA PRISON
Différencier la sanction et l’enfermement ;
Punir un acte implique que l’on sanctionne le fait par l’expiation ou la rétribution (Tocqueville), tandis que sanctionner un homme, c’est considérer qu’on peut le réinsérer (Lucas) ; La peine est un moyen de réparation pour les victimes et de protection de la société
Demande de sécurité accrue de l’opinion publique dans un contexte de crise économique et sociale, notamment contre la délinquance sexuelle. Robert Badinter lors de son audition durant la commission d’enquête : « Que ce soit du côté des tribunaux correctionnels ou des cours d’assises, la durée des peines prononcées n’a cessé de s’allonger. Cela ne signifie pas que le plafond est toujours atteint, mais qu’une tension sociale appelle à la répression, caractéristique d’époques de crise économique.” Sur ce sujet lire Durkheim.
La question du rapport à la peine et de sa signification est importante pour le détenu. Dans le cas des maisons d’arrêt, la peine peut être vécue par une population déjà fragilisées comme la confirmation et l’aboutissement d’un processus définitif d’exclusion de la société.